Le sacrifice d’Isaac

Gn 22, 1-19
février 7, 2024

Or, après ces événements, Dieu mit Abraham à l’épreuve et lui dit : « Abraham » ; il répondit : « Me voici. »

Il reprit : « Prends ton fils, ton unique, Isaac, que tu aimes. Pars pour le pays de Moriyya et là, tu l’offriras en holocauste sur celle des montagnes que je t’indiquerai. »

Abraham se leva de bon matin, sangla son âne, prit avec lui deux de ses jeunes gens et son fils Isaac. Il fendit les bûches pour l’holocauste. Il partit pour le lieu que Dieu lui avait indiqué.

Le troisième jour, il leva les yeux et vit de loin ce lieu. Abraham dit aux jeunes gens : « Demeurez ici, vous, avec l’âne ; moi et le jeune homme, nous irons là-bas pour nous prosterner ; puis nous reviendrons vers vous. »

Abraham prit les bûches pour l’holocauste et en chargea son fils Isaac ; il prit en main la pierre à feu et le couteau, et tous deux s’en allèrent ensemble. Isaac parla à son père Abraham : « Mon père », dit-il, et Abraham répondit : « Me voici, mon fils. » Il reprit : « Voici le feu et les bûches ; où est l’agneau pour l’holocauste ? » Abraham répondit : « Dieu saura voir l’agneau pour l’holocauste, mon fils. » Tous deux continuèrent à aller ensemble.

Lorsqu’ils furent arrivés au lieu que Dieu lui avait indiqué, Abraham y éleva un autel et disposa les bûches. Il lia son fils Isaac et le mit sur l’autel au-dessus des bûches. Abraham tendit la main pour prendre le couteau et immoler son fils.

Alors l’ange du SEIGNEUR l’appela du ciel et cria : « Abraham ! Abraham ! » Il répondit : « Me voici. » Il reprit : « N’étends pas la main sur le jeune homme. Ne lui fais rien, car maintenant je sais que tu crains Dieu, toi qui n’as pas épargné ton fils unique pour moi. »

Abraham leva les yeux, il regarda, et voici qu’un bélier était pris par les cornes dans un fourré. Il alla le prendre pour l’offrir en holocauste à la place de son fils.

Abraham nomma ce lieu « le SEIGNEUR voit » ; aussi dit-on aujourd’hui : « C’est sur la montagne que le SEIGNEUR est vu. »

L’ange du SEIGNEUR appela Abraham du ciel une seconde fois et dit : « Je le jure par moi-même, oracle du SEIGNEUR. Parce que tu as fait cela et n’as pas épargné ton fils unique, je m’engage à te bénir, et à faire proliférer ta descendance autant que les étoiles du ciel et le sable au bord de la mer. Ta descendance occupera la Porte de ses ennemis ; c’est en elle que se béniront toutes les nations de la terre parce que tu as écouté ma voix. »

Abraham revint vers les jeunes gens ; ils se levèrent et partirent ensemble pour Béer-Shéva. Abraham habita à Béer-Shéva.

Commentaire

Un texte horrible, certainement le plus difficile de la Genèse, voire de la Bible : à la fin de cette lecture, on ne sait plus à quel Dieu se vouer ! Ce passage, que l’on appelle aussi « la ligature d’Isaac » a été le sujet de milliers d’heures de travail au cours du temps, et personne à ce jour n’a été capable d’en fournir une explication claire et acceptable par tous.

Kant a cru voir dans ce texte l’immoralité d’un Dieu qui commande à un homme le sacrifice de son fils, Kierkegaard y verra lui le sommet de l’acceptation de l’homme aux ordres de Dieu ; Abraham est-il vraiment un exemple pour le peuple d’Israël ?

Il fait partie de la 2ème révision de la Genèse comme nous l’avons vu hier, celle qui regroupe les chapitres 20 à 22 et qui nous présente une figure d’un Abraham faible qui n’hésite pas à mettre en danger ses femmes et ses enfants, un homme à qui on ne peut absolument pas faire confiance, une figure opposée à celle du Jacob de Gn 31. Il a menti sur le fait que Sara était sa sœur, il a laissé Hagar partir dans le désert avec Ismaël sans eau, il est complètement discrédité devant Abimélek, il va maintenant sacrifier son fils. Et puis au dernier moment, alors qu’il a tout accepté et tout sacrifié, Dieu va le rattraper et lui promettre une longue descendance, tout comme en Gn 12. Petit problème avec cette version élohiste : si on y trouve bien le nom d’Élohim (traduit par Dieu dans notre texte) pour parler du Dieu méchant, on trouve aussi le nom de YHWH (traduit par le SEIGNEUR dans notre texte), ce qui pose un certain nombre de questions littéraires non résolues à ce jour. Autre petit souci : il semblerait que la version élohiste prenne un certain plaisir à réécrire des passages de la version originale pour les remettre à sa sauce (nous avons vu les parallèles avec les passages concernant l’histoire d’Isaac), or il s’agit là d’une véritable création, d’une histoire exclusive, ce qui est surprenant.

L’infanticide est un sujet connu dans plusieurs livres de la Bible, comme dans d’autres textes de l’époque : il n’était pas inconcevable qu’en dernier recours avant la chute d’un pays, son roi aille jusqu’à sacrifier son fils. Il va de soi que les Pères de l’Eglise ont vu dans ce passage un parallèle avec la passion de Jésus, le Fils adoré du Père. Le peuple juif et ses rabbins ont eu du mal à comprendre cette description de leur Dieu, de la même façon qu’ils n’ont pas compris le retrait de Dieu au moment de la Shoah.

La Genèse parle beaucoup de la crainte de Dieu, il semble qu’ici elle soit poussée à bout. Dieu avait donné le jardin d’Eden à Adam qui n’a pas su le garder ; et il a donné à Abraham un fils inespéré. Serait-il en train de reprendre ce qu’il a donné ? Dieu est-il cruel (comme le dit Thomas Romer) ? Il a promis de nombreuses fois de nombreux enfants, mais à la fin, nous n’en voyons que deux, Isaac et Ismaël, qu’il voudrait faire mourir ? Où sont passées les promesses ?

Certains suggèrent que ce n’est pas Dieu qui parlait à Abraham, que c’était Satan…

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