Les marchands de Jean

Jn 2, 13-22
novembre 9, 2023

La Pâque des Juifs était proche et Jésus monta à Jérusalem.

Il trouva dans le temple les marchands de bœufs, de brebis et de colombes ainsi que les changeurs qui s’y étaient installés. Alors, s’étant fait un fouet avec des cordes, il les chassa tous du temple, et les brebis et les bœufs ; il dispersa la monnaie des changeurs, renversa leurs tables ; et il dit aux marchands de colombes : « Otez tout cela d’ici et ne faites pas de la maison de mon Père une maison de trafic. »

Ses disciples se souvinrent qu’il est écrit : Le zèle de ta maison me dévorera.

Mais les Juifs prirent la parole et lui dirent : « Quel signe nous montreras-tu, pour agir de la sorte ? »

Jésus leur répondit : « Détruisez ce temple et, en trois jours, je le relèverai. » Alors les Juifs lui dirent : « Il a fallu quarante-six ans pour construire ce temple et toi, tu le relèverais en trois jours ? »

Mais lui parlait du temple de son corps. Aussi, lorsque Jésus se releva d’entre les morts, ses disciples se souvinrent qu’il avait parlé ainsi, et ils crurent à l’Ecriture ainsi qu’à la parole qu’il avait dite.

Commentaire

Pourquoi St Jean aujourd’hui ? Parce que l’Eglise fête la basilique de Latran à Rome, Basilique du Très-Saint-Sauveur et des saints Jean-Baptiste et Jean l’évangéliste, construite par le pape Sylvestre en l’an 319. Il y a peut-être une idée de Temple chrétien là-dedans.

On trouve ce fameux passage des marchands du Temple dans tous les évangiles, mais Jean le fait d’une manière très particulière. En effet, chez Jean, il n‘y a aucun suspense sur le fait que Jésus est Dieu venu sur terre, ni sur le fait que son séjour est programmé d’avance pour se finir sur la croix. Cela conduit à deux différences majeures :

  • Jean place ce passage comme premier acte de la vie publique de Jésus alors que les trois autres évangélistes le placent à la fin, comme étant le déclencheur de sa passion.
  • Jean vient lier à cet épisode la demande de signe et la parole sur la reconstruction du Temple.

Chez Jean, comme nous l’avons déjà vu, c’est Jésus qui pilote ce qui se passe, en sachant bien où cela va le conduire : un choix déterminé et un cheminement volontaire.

Alors que les synoptiques choisissent un passage de Esaïe pour donner une touche de justification 56.7 « je les ferai venir à ma sainte montagne, je les ferai jubiler dans la Maison où l'on me prie ; leurs holocaustes et leurs sacrifices seront en faveur sur mon autel, car ma Maison sera appelée : « Maison de prière pour tous les peuples » », Jean utilisera lui un verset du Psaume 69.10 « Oui, le zèle pour ta maison m'a dévoré ; ils t'insultent, et leurs insultes retombent sur moi ». Ce choix de référence éclaire bien la différence de pensée : Jean nous montre un Jésus préparé à se faire tuer pour le Père.

Le malentendu sur la reconstruction du Temple en trois jours est elle aussi parlante (on sait que Jean adore les malentendus dans son texte). En l’année 100, on peut voir que les juifs ont réussi à passer le culte du Temple vers les synagogues sur la base de la lecture de la Torah. Jean au contraire va donner le corps de Jésus comme le nouveau Temple, là où habite le Père, et les trois jours dont il parle sont bien sûr ceux passés au tombeau.

Il y avait donc une alternative offerte aux juifs de l’époque de Jésus : s’ils avaient compris que Jésus était vraiment le fils du Père, alors ils auraient pu se reconstruire un Temple sans aucune difficulté.

Un bel exemple de la parole de l’évangile de Jean : en prenant les mêmes faits (on notera que Jésus chasse les animaux du Temple et non les marchands), on peut passer un message complètement différent.

 

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